Une année déjà !
En date du 19 avril 2023, Henri Pons signait le contrat de concession avec sa SEMOP « SEZAME » et celui entre la SEMOP et STEM AERO.
Et une fois de plus, le Maire d’Eyguières choisira le beau milieu des vacances estivales pour faire publier l’avis d’attribution concernant cette concession qui paraîtra finalement le 3 août 2023.
Le contrat aibsi conclu précise qu’il aurait été approuvé par la délibération du Conseil municipal d’Eyguieres du 30 novembre 2020 qui aurait autorisé le maire à le signer.
Fort bien.
Cependant, et c’est ballot, ce contrat de concession conclu entre la Commune d’Eyguières et la SEMOP « SEZAME » n’est pas celui qui avait été présenté au Conseil municipal précité de la Commune.
De plus, et alors même que le contrat de concession est censé comporter une série d’annexes qualifiées « d’indissociables », le contrat d’exploitation consenti à la société STEM AERO est l’unique document annexé.
Par ailleurs, ce contrat est signé, pour la SEMOP « SEZAME », par le Maire Pons en sa qualité de Président du Conseil d’administration, en lieu et place du Directeur Général, Pierre SIGNORET, seul habilité à engager la SEMOP, société anonyme, en sa qualité de représentant légal. Le Code du Commerce ne laisse aucun doute sur le sujet.
De surcroit, il sera précisé que Henri PONS, âgé de 66 ans, ne peut, en principe, exercer les fonctions de Président, la loi fixant à 65 ans la limite d’âge en la matière. Toute nomination violant cette obligation est nulle de plein droit en vertu du même Code du commerce.
Mais il y a mieux :
Le contrat d’exploitation, par lequel le concessionnaire est censé confier à un tiers une part des services ou travaux faisant l’objet du contrat de concession met en place une sous-traitance totale qui est interdite par le Code de la commande publique.
En effet, dès le premier article du contrat d’exploitation, il est précisé que celui-ci a pour objet : « de confier à l’exploitant la réalisation des prestations portant notamment sur l’exploitation des ouvrages existants et des ouvrages acquis pu construits par le concessionnaire ans les conditions ci-après prévues ».
De la sorte, l’exploitant doit réaliser « l’ensemble de prestations (…) du contrat de concession ».
L’absence de sous-traitance partielle mise en œuvre dans le contrat d’exploitation est d’ailleurs confirmée par la généralité de ses termes tout au long de ses 41 articles.
Il est donc évident que le contrat de concession encourt l’annulation par la Justice en ce qu’il comporte en annexe un contrat d’exploitation de même date, conclu entre le concessionnaire et un exploitant, qui aboutit à une sous-traitance totale interdite par la loi.
Dans ce cadre, il convient de souligner que la SEMOP « SEZAME », concessionnaire d’un service public, à laquelle la Commune d’Eyguières est associée, a la qualité de « pouvoir adjudicateur ».
En l’occurrence, le Maire est le président du conseil d’administration et la Commune d’Eyguières, qui apporte 46% du capital social, dispose, en outre, de trois membres au sein de ce conseil d’administration.
De son côté, la gestion de la SEMOP, constituée à l’initiative du Maire d’Eyguières, est, à son tour, soumise au contrôle de la Commune par le contrat de concession.
La SEMOP « SEZAME » a donc bien la qualité de « pouvoir adjudicateur ».
Or, il apparait qu’aucune procédure de nature à respecter les règles de mises en concurrence préalable n’a été mise en place par la SEMOP, pour retenir la société STEM AERO dans le cadre pourtant déterminant du contrat d’exploitation.
Au contraire, le préambule du contrat d’exploitation contient une formulation qui ne fait d’ailleurs aucun sens, évoquant un prétendu respect, par avance, des règles de mises en concurrence, et ce alors que la SEMOP « SEZAME » n’avait pas même été créé :
Le contrat de concession, en son article 4, autorise le concessionnaire à conclure des sous-contrats pour assurer la réalisation des prestations confiées au Concessionnaire. C’est à ce titre que, dans le cadre de la procédure de mise en concurrence en vue de la conclusion du contrat de concession, le Concédant a agréé l’Exploitant pour assurer l’exploitation de l’aérodrome.
Extravagant !
En réalité, il est uniquement question dans le « rapport d’analyse des candidatures et des offres » élaboré en 2020 par la Commune d’Eyguières, de la société STEM INTERNATIONAL, et encore en ces termes :
Lettre de candidature de STEM International. La société STEM international dont le cœur de métier est l’exploitant de zones ludiques et touristiques. L‘aéroport d’Eyguières entre dans leur logique de diversification et d’extension de leurs compétences, concentrées actuellement en zone de montagne (d’après une déclaration de candidature) … CV du Président, Directeur de STEM International, Vincent TASSART.
Or, il convient de rappeler que la société STEM INTERNATIONAL est une SASU créée le 20 mai 2016, immatriculée au Registre du commerce de Toulouse, avec comme président, Monsieur Vincent TASSART, avec pour objet social notamment l’exploitation de stations de montagne.
Pour sa part, la société STEM AERO est une SASU qui n’a été créée que le 28 juillet 2020, soit postérieurement à la réception et à l’étude des candidatures par la Commune d’Eyguières fin 2019 et qui a pour Président Monsieur Stéphane CHAMPANHET.
Il s’agit donc de deux sociétés parfaitement distinctes, avec deux numéros de SIRET différents et deux dirigeants différents.
Il sera, de surcroit, précisé que la société STEM AERO est spécialisée dans les « activités des agences de publicité » et autres « services de conciergerie ». Une mention d’exploitation d’aérodromes n’apparaitra que plus tard dans les statuts de cette « société » à associé unique.
Il ne peut donc, quoiqu’il en soit, être soutenu que « dans le cadre de la procédure de mise en concurrence en vue de la conclusion du contrat de concession, le Concédant a agréé l’Exploitant pour assurer l’exploitation de l’aérodrome »
En revanche, il ressort de cette même formulation que le choix d’un exploitant à la suite du contrat de concession ne saurait procéder que d’un « pouvoir adjudicateur ».
Or, en l’espèce, la société STEM AERO n’a pas été retenue dans le respect des règles de mises en concurrence.
D’une part, ce choix n’a pu matériellement intervenir au moment de l’étude des candidatures, en 2019/2020, en vue de la constitution d’une SEMOP. Quoiqu’il en soit, un tel choix aurait alors supposé l’application de règles de mise en concurrence spécifiques pour l’exploitant qui est un tiers par rapport au lien contractuel unissant la SEMOP et la Commune.
D’autre part, de l’aveu même du préambule du contrat d’exploitation, aucune règle de mise en concurrence dans le choix de l’exploitant n’a été respectée par la SEMOP « SEZAME », créée bien avant la conclusion du contrat d’exploitation le 19 avril 2023.
La société STEM AERO ne dispose donc pas de la qualité d’exploitant en bonne et due forme. Et ne parlons même pas des factures qu’elle est en train de diffuser !
Il n’y a, notamment, eu aucun respect des règles de mise en concurrence concernant la décision de la retenir comme exploitant de l’aérodrome d’Eyguières, alors que la SEMOP « SEZAME », en qualité de « pouvoir adjudicateur », demeure tenue au respect de ces règles.
L’AUPASE a donc demandé au Tribunal Administratif de Marseille d’annuler la décision de la SEMOP « SEZAME », pouvoir adjudicateur, par laquelle elle a retenu la société STEM AERO en qualité d’exploitant.
Cette décision sera de plus fort annulée que le Président signataire du contrat d’exploitation, n’a aucune compétence pour engager, en lieu et place du Directeur général, la SEMOP et parce que, ayant atteint la limité d’âge, il ne peut, de toute façon, plus exercer les fonctions de Président.
En agissant ainsi, la SEMOP a violé ses propres statuts.
En effet, il n’y a eu aucune décision préalable du conseil d’administration à la majorité des deux tiers autorisant la SEMOP « SEZAME » à contracter avec la société STEM AERO, telle que prévu par l’article 18 de ses statuts.
Par ailleurs, en tant que de besoin, la prétendue décision, mentionnée dans le contrat d’exploitation, selon laquelle « le Concédant », c’est-à-dire la Commune d’Eyguières, elle-même « pouvoir adjudicateur », aurait agréé « l’Exploitant pour assurer l’exploitation de l’aérodrome », ne pourra qu’êtreannulée également.
Une telle décision ne peut en effet matériellement exister eu égard à la chronologie et elle aurait, de toute façon, supposé l’application des règles de mise en concurrence spécifiques pour choisir l’exploitant.
Tout cela n’empêche pas Monsieur Stéphane Champanhet de continuer à se positionner en « exploitant » de l’aérodrome de Salon-Eyguières.
Cependant, les conditions de la mise en œuvre de cette « exploitation », s’il en est, semblent un peu plus compliquées de jour en jour.
Pour s’en convaincre, il suffira de consulter les évaluations du site societe.com : En ce début mai, le score de STEM AERO est passé à 4 sur 20, catégorie « E » et assorti d’une « classe de risque » qualifiée de « très élevé ».
Pas de quoi pavaner !
De plus, le site mentionne que « cette structure opère dans un secteur d’activité risqué pour sa taille ».
Ceci posé, l’élément le plus original que nous avons pu trouver reste la formule de rémunération de STEM AERO, telle qu’énoncée dans le contrat d’exploitation signé en toute illégalité par Henri Pons :
La transparence à son paroxysme !
Le rédacteur de cette formule doit être nobélisable !
Et puisque la SEMOP, en dehors de son maigre capital social, ne dispose actuellement pas d’autres ressources, il est loisible de parier qu’arrivera rapidement le cas prévu par l’article 11.3 du contrat d’exploitation. Sous le titre plus qu’évocateur « Exploitation Dégradée », on peut y lire que :
Les Services de base et les services complémentaires, les charges et la rémunération associées s’entendent dans le cadre d’un développement normal du projet et, en particulier, en cas d’obtention définitive des autorisations administratives nécessaires à sa pleine réalisation.
Et que :
Dans le cas où le Concessionnaire constate l’impossibilité, pour quelque raison que ce soit, de réaliser en tout ou partie les bâtiments prévus sur la zone Aérodrome, il en informe l’Exploitant dans les meilleurs délais. Sous réserve d’un préavis de six mois (…), celui-ci passe en mode d’exploitation dit « dégradé ».
Bien évidemment, nous ne savons pas si une telle information a été faite. Une chose est cependant certaine : Le cas cité est avéré.
Il paraît évident qu’à défaut d’être autorisé à réaliser les « bâtiments prévus sur la zone Aérodrome », le trio Pons-Signoret-Champanhet met actuellement en œuvre « l’Exploitation Dégradée » visée par le contrat d’exploitation.
Et, afin de pouvoir satisfaire aux dispositions contractuelles stipulant que : « … l’Exploitation dégradée doit, en tout état de cause, permettre au Concessionnaire de respecter ses obligations au titre du Contrat de Concession », il a dû être décidé d’appliquer aux hangars construits par les utilisateurs les tarifs initialement prévus pour les bâtiments projetés mais qui ne verront jamais le jour. Un comble !
Pour le surplus, il est question d’un « Plan d’Affaires de l’Exploitation Dégradée » et de « conditions d’exploitation figurant en annexe 11 », documents bien évidemment manquants à la publication.
En conclusion, le dossier STEM AERO illustre de manière frappante les dérives possibles lorsque les règles sont contournées au profit d’intérêts particuliers. Non seulement les procédures de mise en concurrence ont été bafouées, mais également les principes élémentaires de transparence et de légalité.
Le résultat est une situation où l’exploitation de l’aérodrome se trouve actuellement compromise, mettant en péril les finances d’une commune d’à peine 7 000 habitants.
Reste à souhaiter que les décisions de justice à intervenir permettent de revenir à terme à un fonctionnement conforme aux normes éthiques et légales.